Avec son histoire millénaire et ses saveurs infinies suivant les pays, les régions voire même suivant les villages de production, la sauce de soja est un des piliers de la cuisine d’Asie du Sud-Est. Mais attention ! Il y a sauce de soja et sauce de soja…
A l’Est comme à l’Ouest, au Nord comme au Sud, de tous temps les hommes ont cherché des moyens de conserver les aliments. D’expériences en déboires, ils ont ainsi appris que le sel ne se contente pas d’améliorer le gout de la nourriture, mais il peut également faire office de conservateur.
Dans la Chine ancienne, avant la sauce de soja était le Jiang. À partir de la fin de la dynastie Zhou (1046-256 avant notre ère), on connait le jiang sous la forme d’une pâte qu’on espère savoureuse, fabriquée à partir de la fermentation de viande, de poisson ou de céréales. Il s’en fabriquait aussi à base de fruits de mer et de légumes. Sous la dynastie Han (206 av. J.-C.-220 ap. J.-C.), ces ingrédients ont été remplacés par le soja, beaucoup plus accessible car facile à récolter, même sur des terres pauvres. C’est probablement ce qui explique que les recettes de jiang à base de graines de soja se sont développées plus rapidement que celles à base d’autres aliments. A cette époque, le jiang change son nom en douchi et se présente sous la forme d’une pâte fermentée à base de graines de soja salées et semi-fermentées. C'est ce douchi qui a finalement évolué en sauce soja. Il a pris son nom chinois moderne, jiangyou, sous les Song (960-1279). Courant du 13ème, la production de sauce de soja commence à bien s’installer au Japon et sa diffusion interculturelle fera d’elle un ingrédient clé dans les cuisines du Japon, de la Corée et du Vietnam. Aux 17ème et 18ème siècles, la sauce de soja arrive en Occident grâce aux marchands néerlandais et entre par la même occasion dans la composition de la sauce Worcestershire, développée en Angleterre dans les années 1800.
Sa recette est différente selon son pays d’origine et plusieurs déclinaisons existent même au sein d’un seul pays. Détail amusant : de nos jours, la sauce de soja est le troisième condiment le plus populaire aux États-Unis, après le ketchup et la mayonnaise.
La sauce soja est tout simplement un mélange de graines de soja fermentées. En fait, pas uniquement. Il y a aussi de l’eau pour donner la consistance liquide, du blé et du sel marin. Et pas mal de savoir-faire, quand elle est produite artisanalement.
C’est le dosage des ingrédients qui influence la couleur et le gout du produit fini. Il existe aussi des sauces de soja sucrées, de couleur et de texture différentes de la salée. De couleur ambrée, brunâtre à rougeâtre, plus ou moins foncée, la sauce de soja est riche en acides aminés libres.
De nos jours, les sauces soja bas de gamme qu’on trouve dans les supermarchés de France ou d’Europe ne sont pas produites par fermentation mais par un processus d’hydrolyse chimique. L’avantage – si l’on peut utiliser ce terme – est une production rapide : seulement deux ou trois jours. Par contre, n’espérez pas un produit riche en gout et en saveurs ! S’il n’y a pas écrit « fermentation naturelle » sur la bouteille, c’est probablement une sauce soja produite chimiquement.
Le saviez-vous ? Sur les 5 millions de tonnes de sauce soja que la Chine produit chaque année, moins de 5 % sont fabriquées avec des techniques d'affinage et de fermentation traditionnelles. Quant aux sauces garanties sans additif, elles ne représentent au final que 0,1 % du marché.
Il est indéniable que la sauce de soja a su faire son nid dans les rayons des supermarchés occidentaux ! J’imagine qu’en ouvrant votre frigo, on verrait, flanqué de son bocal de cornichons et d’un tube de mayo, une bouteille de sauce de soja… Mais avez-vous choisi la bonne ? Car il n’y a pas une sauce soja, il y en a des dizaines, comme vous l’apprendrez si vous avez l’appétit de continuer la lecture de cet article. Avant tout, gardons en tête que savoir choisir sa sauce soja, c’est d’abord savoir son origine. Car selon les pays, leur savoir-faire et leur tradition culinaire, la sauce n’aura pas la même saveur, ni la même composition. Voici quelques conseils rapides pour vous guider dans vos futures emplettes :
Règle absolue : lire attentivement les étiquettes avant de choisir une sauce soja. Si elles mentionnent d'autres ingrédients que des graines de soja, du blé, de l'eau et du sel, il s'agit alors d'additifs superflus. Non seulement on les banni, mais on évite par la même occasion les conservateurs, les colorants et surtout on a en horreur le MSG (le sodium glutamate, qui rend les plats soi-disant plus savoureux). Idéalement, le niveau d'acides aminés libres doit dépasser les 0,8 g/100 ml. Et enfin, dernier conseil, une bonne sauce soja doit être légèrement sirupeuse et révéler une belle couleur foncée, plutôt ambrée, ainsi qu'un léger parfum.
Le saviez-vous ? La saveur odorante dégagée par la sauce de soja est appelée unami au Japon et "conte de fées" en Chine (traduit mot à mot, ça veut plutôt dire « gout frais », mais la sauce de soja rend d’humeur poétique). En fait, unami, c’est le gout du glutamate présent dans la sauce. Ce qui est tout de suite moins poétique.
Nous l’avons déjà évoqué, il existe de nombreux types de sauce soja, qui varient fortement par pays, avec leurs ingrédients, leur processus de fabrication, temps de fermentation ou éventuellement leurs additifs (sucre, épaississant, arômes…).
Après son introduction au Japon au 7ème siècle par des moines bouddhistes, la transformation du jiang n’a cessé de se perfectionner. Le processus de fabrication de la sauce soja naturellement fermentée s’était établi au milieu du 17ème siècle et a ensuite commencé à se diffuser dans tout le pays. De nos jours, la sauce soja japonaise est celle qu’on connaît le mieux, et qu’on trouve le plus couramment en supermarché. Elle est fabriquée avec un mélange à parts égales de soja et de blé.
En japonais on l’appelle shōyu. Il en existe deux variantes principales : foncée et claire.
La sauce soja chinoise (appelée jiàng yóu) diffère de sa cousine japonaise dans sa proportion de blé, plus faible, et qui est ajoutée sous forme de farine (les Japonais utilisent des grains entiers). Il en existe également deux types principaux, clair et foncé. En Chine, c’est la sauce soja claire (shēng chōu) qui est utilisée le plus couramment.
Introduite en Corée pendant l’occupation japonaise (1910-1945), elle est donc proche de la sauce soja foncée japonaise. Même si les deux ont un peu divergé avec le temps, on peut raisonnablement les utiliser de façon interchangeable. En coréen, la sauce soja s’appelle ganjang. Ici aussi on trouvera deux types principaux de sauce soja : la sauce soja la plus courante est appelée ganjang, wae-ganjang, ou sauce soja japonaise. Si vous vous lancez dans la préparation d’une recette coréenne et qu’il n’y a aucune précision sur quelle sauce utiliser, ce sera celle-là dont il est question.
En Thaïlande la sauce soja est appelée sii-íu. Il existe, sans surprise, la sauce soja blanche et la sauce soja noire. C’est sii-íu kǎao, la sauce de couleur pâle qui est la plus courante.
Au pays des deux deltas, les choses se compliquent un peu, même si au fond, on retrouve deux qualités de sauce. Tout d’abord, son ancienne façon de l’appeler : vu ses origines chinoise, elle était lue et prononcée en sino-vietnamien : « thi du » ou « tu vi yieu ». Ceci étant posé, il s’agit bien d’une sauce obtenue par fermentation de graines de soja, de céréales torréfiées, d’eau et de sel. Une sauce qui au final prendra… deux appellations : xì dầu (se prononce si-zao) et nước tương (oui, ça se prononce aussi, mais…c’est compliqué). L’honnêteté intellectuelle me pousse à vous dire que xi dau – sauce de soja noire est de teinte foncée avec une texture visqueuse, alors que la sauce de soja nuoc tuong aura tendance à être plus fine, plus légère. La sauce soja claire a un goût salé et se pare d’une couleur brun clair et opaque. La sauce soja light/claire n’a rien a voir avec la sauce soja à teneur réduite en sel ou d’autres produits qui peuvent également porter des étiquettes telles que «light» ou «légère». Au gout, la noire est plus riche, plus charpentée, un peu plus sucrée que la sauce de soja. Du coup, la cuisinière émérite ne les utilisera pas de la même façon : avec son goût riche, son arôme puissant et sa viscosité élevée, la sauce de soja noire est souvent utilisée pour assaisonner et non pour faire une trempette. Ce rôle est dévolu à nuoc tuong. Si notre cuisinière voulait – c’est son droit – préparer une sauce à base de xi dau, elle rajouterait de l’eau et quelques épices. On trouve des bouteilles de sauce de soja estampillées « sauce noire » ou « sauce claire » ou « dark » et « light ». Pour enrichir le tout, la sauce de soja peut être aromatisée aux champignons noirs (pour le coup, ça sera vraiment xi dau). Pour faire court, retenez que si la sauce de poisson (nuoc mam) distinguait surtout la cuisine citadine, la sauce de soja (nuoc tuong) était d’un emploi plus généralisé à la campagne parce que chaque foyer pouvait la préparer lui-même. Une préparation aux étapes longues et méticuleuses.
Pour une fabrication artisanale, l’alchimie tient à la qualité des graines de soja, du riz gluant et du sel. Il faut choisir des graines bien rondes, pour qu’elles ne grillent pas pendant la torréfaction. Ensuite, on y ajoute de l'eau qu’on fait bouillir jusqu'à évaporation, les graines deviennent presque sèches. De l'eau et le soja sont mélangés avec le riz fermenté dans les jarres pendant au moins 3 mois pour se transformer en sauce soja. L’élément clef ici est le riz gluant, qui fait office de levure. Mais pour qu’il puisse remplir ce respectable office, une fois préparé, il doit être mis à sécher au soleil et une fois qu’il a atteint une couleur jaunâtre, il est mélangé avec du sel, puis remis à sécher sur des paniers en bambou jusqu'à atteindre une dessication complète. Il sera stocké dans des jarres pour conserver son pouvoir et sa douceur. Il parait que le vent et le soleil de certains villages donnent un riz gluant à la fermentation unique… Et enfin sachez que de nos jours, les femmes réputées dans l’art du tuong se comptent sur les doigts d’une main. Etonnamment, on leur demande toujours de donner des conseils aux filles à marier… Quand la première jarre de sauce est prête, la famille en fait toujours goûter aux voisins. À tour de rôle pour renforcer les liens d’amitié.
Comme pour le vin, la sauce tuong a ses crus, par exemple Ban Yen Nhan dans la province de Hung Yen (Nord) et Cu Dà en banlieue de Hanoï qui exportent en Amérique, en France, en Russie... à l’intention des ressortissants vietnamiens – et de tous les gourmets. Sans oublier le superbe vieux village de Duong Lam, une de mes destinations coup de cœur.
Le saviez-vous ? Les bonzes consomment le nuoc tuong et non le nuoc mam.
Recette pour 4 personnes
Ingrédients
500 g travers de porc
1 cs de sucre
1 cs sauce nuoc-mâm
1 cs sauce chili
1 cs de sauce soja
10 cl sauce tamarin
10 cl bouillon de poulet
100 g de gingembre
150 g pousses de salade
1 oignon
5 gousses d’ail
1 demi-cuillerée à soupe de poivre noir moulu
2 cuillerées à soupe de graines de sésame doré
Etapes
Préparation des travers de porc
Coupez les travers de porc en lamelles de 7-8 cm de long (2 os par morceau). Remplissez une casserole d’eau salée et portez-la à ébullition. Lorsque l’eau bout, plongez les ribs et faites cuire pendant 10 minutes. A l’aide d’une passoire, égouttez les travers de porc et disposez-les dans un plat.
Marinade
Mettre tous les ingrédients de la marinade dans un saladier, bien mélanger. Ajoutez les travers de porc découpés, plastifiez ou couvrez et laissez mariner idéalement 6 heures au frais. Plus la viande marine, meilleure elle est.
Cuisson
Au moment de cuire, égoutter les travers, les faire dorer à feu vif (ou au four en mode grill pendant 15/20 mn), arroser régulièrement de marinade et laisser cuire 30 minutes en tournant souvent.
Dressage
Pour servir, saupoudrez les travers de porc de graines de sésame, parsemez de cébettes émincées et déguster avec un riz blanc.
Le village où on peut voir cet artisan
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