Si la gastronomie vietnamienne enchante et étonne, ce n’est pas seulement à cause de sa créativité délicieuse et raffinée, mais également par son esprit. Car la cuisine du Vietnam se doit de nourrir aussi bien le corps que l’esprit, dans une vision harmonieuse et équilibrée des énergies qui animent le vivant.
Prononce nam en langue vietnamienne ou ngu dans les expressions littéraires sino-vietnamiennes, le cinq possède une mystique à part, à l’ésotérisme fondateur. Il régit bon nombre de concepts culturels et spirituels, souvent empruntés à la culture chinoise et/ou indienne, cette dernière étant par ailleurs souvent passée au tamis de la culture de l’Empire du Milieu. Ainsi, dans cette tradition indo-bouddhique, le 5 peut signifier les Cinq Misères (Ngu khô) que sont la naissance, vieillesse, mort, maladie et séparation. On y voit aussi les Cinq Abstentions (Ngu gioi), soit le meurtre d’animaux, l’usage de boissons alcoolisées, la fornication, le vol et le mensonge. Bien entendu, la magie du 5 opère aussi dans les Voies de la Transmigration (Ngu dao) sous la forme de Génie céleste, homme, démon infernal, animal et démon famélique. Plus communément, le 5 régit les Cinq Éléments du cosmos (Ngu hành), qui sont le Bois, le Métal, le Feu, l’Eau et la Terre. Ceux-ci se retrouvent absolument partout, de la médecine traditionnelle (on liste 5 viscères…) à la cuisine, avec les Cinq Saveurs (Ngu vi) : acide, piquant, amer, salé, sucré. Il ne sera donc pas étonnant de le retrouver notamment sous la forme du riz gluant aux cinq couleurs - xôi ngu sac - plat traditionnel d’un grand nombre de communautés ethniques du Nord Vietnam. Ici, le rouge, jaune, vert (ou violet), noir et le blanc représentent les cinq éléments de base du cosmos, constituant le yin et le yang. Pour la petite histoire, le peuple Cao Lan voit dans chaque couleur une symbolique particulière : le rouge représente le feu, le noir l'eau, le blanc les métaux, le vert (ou le violet) représentent la flore, et le jaune symbolise la terre. Ce sont les origines des êtres vivants, du paradis et de la terre. Ce plat est préparé pour les célébrations du nouvel an lunaire, dans le but de d’attirer sur eux et leur famille chance, bonne santé, longévité et solidarité. Les Thaï, quant à eux voient dans le rouge le symbole de l’aspiration, le violet signifiant la prospérité du ciel et de la terre, le jaune est synonyme d’une vie aisée, alors que le vert représente les montagnes et les forêts du Nord-Ouest et que le blanc est associé à l’amour et à la fidélité.
On le voit, on est loin d’une bête gamelle de riz…
Le chiffre 5 se retrouve très fréquemment dans l’art culinaire du Vietnam.
Prenez par exemple la sauce la plus typique, le fameux nuoc mam ou saumure de poisson. Dans l’élaboration de cette sauce nationale interviennent les 5 saveurs classées selon les 5 éléments du Yin et du Yang : man (salée) avec le jus de poisson (nuoc mam), dang (amère) avec le zeste du citron (vo chanh), chua (acide) avec le jus de citron (ou le vinaigre), cay (piquante) avec le piment finement émince et ngọt (sucrée) avec le sucre en poudre. Ces cinq saveurs renvoient à la symbolique des 5 éléments définis dans le concept du Yin et du Yang.
Comme autre exemple, prenons le potage aigre-doux (canh chua) préparé sur une base de poisson : on y retrouve la saveur acide avec les graines de tamarin ou avec le vinaigre, le sucré avec les tranches d’ananas, le piquant avec le piment émincé, le salé avec le jus de poisson et enfin la saveur amère sous la forme de quelques gombos (dau bap, connu aussi sous le nom d’okra,) ou avec les fleurs de fayotier (bong so dua). Au moment de servir, on ajoutera a cette soupe quelques herbes parfumées comme le panicaut (ngo gai) et rau om (herbe aux saveurs proches de la coriandre avec une note citronnée).
Pour en revenir avec notre riz gluant aux 5 couleurs, il semblerait que ce soit les Proto-Vietnamiens qui ont eu la délicieuse idée de léguer la recette à leurs descendants, au fil des millénaires de leur civilisation. Le cycle d’engendrement Feu->Terre->Métal->Eau->Bois se trouve ici magnifiquement illustré par l’intérieur du gâteau qui se voit garni d’un morceau de viande de porc de couleur rouge (le Feu) entouré par une sorte de pâte faite avec des fèves de couleur jaune (la Terre). Le tout est enveloppé par le riz gluant de couleur blanche (le Métal) pour être cuit avec de l’eau bouillante (l’Eau) avant de se colorer de vert en surface grâce aux feuilles de latanier (le Bois).
Ainsi, pour invisibles qu’ils soient, ces piliers structurent l’esprit et la recette de tout plat vietnamien, du plus humble au plus sophistiqué. Lors de votre prochain séjour au Vietnam, lancez-vous le défi de reconnaitre les 5 goûts et les 5 textures qui doivent être systématiquement présents dans votre bol. Le pimenté, l’acide, le sucré, l’amer et le salé doivent participer à l'harmonie du plat, agissant de concert avec les textures croustillantes, molles, moelleuses, craquantes et soyeuses. Vous l’aurez deviné, tout est question d’équilibre…
Pour sortir de cette spiritualité gourmande, notons que les 3 régions du Pays du Dragon donnent naissance à 3 cuisines différentes, un autre aspect fondamental de la cuisine du Vietnam.
Nous avons déjà abordé ce sujet, nous nous contenterons ici de résumer en différenciant les terroirs, avec deux constantes au Nord : la sauce soja, très utilisée, fait office de marqueur de la cuisine « nordique », tout comme le riz gluant du delta du Fleuve Rouge, un des meilleurs du Vietnam. Au Sud, les spécialités vietnamiennes sont plus sucrées, alors que la cuisine du Centre prend des saveurs plus salées, héritage de la méthode de conservation ancestrale par le sel. Elle est aussi plus épicée, ayant été influencée par la cuisine indienne, qui lui a légué le piment. Les pickles sont aussi des éléments iconiques de cette région.
La culture culinaire du Vietnam ne se limite pas à une liste de plats et/ou recettes. Elle se voit sous un prisme multi-facette (culturel, social, spirituel, politique, commercial), qui la différencie des pays voisins. La gastronomie du Vietnam est aussi complexe que son histoire mouvementée et que sa diversité géographique. Ainsi, c’est dans le Nord Vietnam actuel qu’est né le premier État proprement vietnamien, après mille ans de domination chinoise. C’est justement sous le joug de l’empire chinois que les Vietnamiens ont appris et assimilé plein de choses, dont l’usage des baguettes. Plus tard, courant du 11ème siècle et sous l’appellation de Royaume Dai Viet, le Vietnam se retrouve coincé entre les deux puissances de l’époque : la Chine au Nord et le Royaume Champa au Sud, sans parler de l’Empire Angkorien à son apogée avec Angkor Wat. Des alliances opportunistes se créent pour contrer l’envahissant « Grand Frère » du Nord, puis courant du 13ème, profitant du déclin de l’empire du Champa, le Vietnam grignotera petit à petit tout le Sud, jusqu’à l’annexer courant du 17ème. Pendant toutes ces années, le Pays en forme de S s’inspirera de la cuisine des Cham, profondément indianisée et résolument tournée vers la mer. C’est pourquoi, encore de nos jours, les habitants du Centre du Pays mangent plus volontiers des fruits de mer, par rapport à leurs congénères du Nord voire même du Delta du Mékong. La cuisine de Hue est très révélatrice de ce fait.
Cette période, via la vitalité du comptoir maritime de Hoi An, alors connue sus le nom de Faifo,, voit aussi l’arrivée des épices et notamment du safran et de la cannelle. Plus au Sud, dans l’imagination des Vietnamiens de l’époque, le Delta du Mékong représente une sorte de terra icognita, fertile et traversée d’arroyos, parsemée de marécages. Une sorte de Far West indochinois qui favorise la créativité, la prise de risque et l’esprit d’entreprise. Pour la petite histoire, dans la langue vietnamienne moderne, le Delta du Mékong est surnommé mien Tay, ce qui veut dire “Far West”. Ainsi, dans la culture culinaire, les Vietnamiens du Sud n’hésitent pas à inventer de toute pièce de nouveaux plats qui n’ont plus rien à voir avec les plats du Nord et du Centre. Dans leur lancée, ils revisiteront avec éclat les plats traditionnels.
Et enfin, plus proche nous, sous les Nguyen, la cuisine s’inscrit dans les codes particulièrement stricts d’un confucianisme d’état, se détachant des recettes pour intégrer d’autres valeurs aussi bien comportementales que culturelles voire spirituelles.
En espérant que toute cette littérature ne vous a pas coupé l’appétit, si nous passions en cuisine ?
2 blancs de poulet rôti effilochés
1 c. à soupe d’huile d’arachide
1 c. à café de sauce soja
2 carottes taillées en julienne
1 bol de chou chinois finement émincé
3 branches de céleri émincées finement
½ concombre taillé en julienne
1 échalote émincée finement
4 tiges de menthe fraîche effeuillées et hachées
4 tiges de coriandre effeuillées et hachées
4 c. à soupe de cacahuètes salées concassées grossièrement
Poivre du moulin
Le jus de 2 citrons verts
1 c. à soupe de Nuoc-mâm
1 c. à soupe de gingembre frais râpé
1 gousse d’ail épluchée et râpée
½ piment oiseau rouge haché
1 pincée de sucre en poudre
Versez dans un saladier l’huile et la sauce soja, poivrez et fouettez. Ajoutez le poulet et mélangez bien pour bien imbiber la viande.
Préparez la sauce : versez dans un bol la sauce nuoc-mâm et le sucre en poudre. Mélangez. Ajoutez les autres ingrédients.
Ajoutez dans le saladier les carottes, le chou, le céleri, le concombre, l’échalote et les herbes. Mélangez. Arrosez de sauce et mélangez bien. Terminez en ajoutant les cacahuètes sur la salade.
Vietnam Original Travel vous souhaite de bonnes dégustations et découvrons ensemble quelques plats typiques du Vietnam.
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Merci pour toutes ces informations
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